Libération : Sarkozy, attraction n° 1 du carnaval en Martinique:
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Sarkozy, attraction n° 1 du carnaval en Martinique
Pantin, textes satiriques, les Antillais moquent le ministre qui leur rend
visite aujourd'hui.
par Laure MARTIN-HERNANDEZ
QUOTIDIEN : jeudi 09 mars 2006
Fort-de-France correspondance
«Promenons-nous à Fort-de-France, pendant que Sarko n'y est pas. Si Sarko y
était, on l'aurait kärchérisé.» La chanson a été diffusée dix fois par jour
sur les radios martiniquaises. Elle a résonné dans les rues, sortant des
murs d'enceintes portés sur des chars, et dans les soirées privées qui
attirent des milliers de fêtards costumés pendant les «jours gras», la
semaine dernière. Alors que Nicolas Sarkozy arrive aujourd'hui aux Antilles,
l'air Sarko, signé Eric Virgal, a contribué à faire de l'épisode de la
première visite annulée du patron de l'UMP aux Antilles en décembre l'un des
thèmes centraux du carnaval 2006 en Martinique.
Zouk. Le musicien compositeur de zouk perpétue ainsi une longue tradition de
satire politique pendant le défouloir annuel du carnaval. L'an dernier, la
crise de la banane antillaise avait dominé. Auparavant, les parades
s'étaient emparées du passage à l'euro et de son taux de change de 6,55957
francs «qui donne mal à la tête». L'Europe avait déjà été mise à mal en
1992, l'année du référendum de Maastricht, avec la chanson Voici le loup qui
vient nous dévorer. Et la vie politique locale fourmille de thèmes
humoristiques qui s'expriment pendant cinq jours de délires.
Vaval et bwabwa. Chaque année, le thème du carnaval est symbolisé par Vaval,
un «bwabwa», personnage de carton-pâte, construit par une association de
Fort-de-France. Porté dans les parades jusqu'au mercredi des Cendres, il est
brûlé à la nuit tombée devant cent mille carnavaliers, mettant le point
final aux festivités et ouvrant la période du carême. Avant sa première
sortie, la rumeur courait : Vaval serait Sarko. Les paris étaient lancés.
Finalement, le ministre de l'Intérieur n'est visé qu'indirectement. Vaval
fait référence à «la loi de la honte» sur les aspects «positifs» de «la
présence française outre-mer». Le texte du 23 février 2005, proposé et voté
par l'UMP, avait déchaîné la colère des descendants d'esclaves des Antilles,
obligeant Sarkozy à reporter son voyage en décembre. Vaval 2006 est un
nostalgique de la colonisation, un personnage double, mi-colon maniant le
fouet, mi-député bombant le torse. Son oeuvre, la «loi de la honte», repose
à ses pieds. Un membre de l'association explique avec ironie : «On aurait pu
choisir Sarko, mais une superstition veut que le bwabwa porte chance à celui
qui est représenté...» Ils n'ont pas couru le risque.
«Sarko Phage». Les attaques contre Sarko s'expriment aussi dans «les vidés»,
des défilés spontanés dans lesquels des centaines d'anonymes costumés
s'élancent derrière un groupe de musiciens. Ici, un homme porte un écriteau
«Sarko Phage». Il est coiffé d'un chapeau en plastique imitant la peau de
crocodile et se dit «chasseur de reptiles». Plus loin, un groupe a composé
des textes autour des déboires conjugaux du ministre de l'Intérieur sur une
mélodie de Claude François. «Cette année-là» a cédé la place à «Cécilia».
Enfin, Nicolas Sarkozy a aussi figuré en bonne place dans le carnaval aux
côtés des groupes aux couleurs de la nature et des traditionnels travestis.
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